Une circulaire essaie de clarifier le régime des "modifications substantielles" des ICPE

Le Ministère de l'Environnement vient de publier une circulaire sur l'appréciation des modifications substantielles au titre de l'article R.512-33 du code de l'environnement.

Cette circulaire rappelle aux Préfets, DREAL et inspecteurs des ICPE le cadre réglementaire applicable et essaie de définir une politique cohérente sur l'ensemble du territoire pour un sujet devenu très complexe et dans les faits géré le plus souvent au doigt mouillé par les responsables.



La circulaire s'intéresse à la question suivante : dans quels cas une modification est dite substantielle et doit par conséquent être précédée d'une nouvelle demande d'autorisation ICPE de la part de l'exploitant ?


Quand l'exploitant d'un site soumis à autorisation ICPE apporte une modifications à ses installations (par exemple, augmentation de capacité, réorganisation des installations sur site, modification du processus industriel, etc), il doit en effet se conformer aux dispositions de l'article R.512-33 du Code de l'environnement qui dispose que :

"toute modification apportée par le demandeur à l'installation, à son mode d'utilisation ou à son voisinage, entraînant un changement notable des éléments du dossier de demande d'autorisation doit être portée, avant sa réalisation, à la connaissance du préfet avec tous les éléments d'appréciation. S'il estime, après avis de l'inspection des installations classées, que la modification est substantielle, le préfet invite l'exploitant à déposer une nouvelle demande d'autorisation".

Qu'est-ce qu'un "changement notable" ou une "modification substantielle" ?

Historiquement, le droit positif français ne précisait pas ce que "changement notable" ou "modification substantielle" signifiait. L'exploitant était par conséquent laissé à l'arbitraire des autorités de contrôle et parfois à celui des tribunaux administratifs. De plus, le traitement pouvait être très différent d'un département à l'autre.

Cette situation a été jugée contraire au droit communautaire de l'environnement si bien que, fin 2009, le Ministère de l'Environnement a modifié l'article R.512-33 du Code de l'environnement et apporté des précisions réglementaires à la notion de changement notable.

Cependant, la situation n'a pas été simplifiée pour autant. Au contraire, il faut aujourd'hui distinguer trois cas dans lesquels une modification est considérée comme substantielle :

1. cas particulier numéro 1 - en cas d'augmentation de capacité avec franchissement de certains seuils réglementaires de la nomenclature, à savoir (i) Autorisation/déclaration vers IPPC ou (ii) déclaration/autorisation vers Seveso seuil haut ; Critères Objectifs.

2. cas particulier numéro 2 - en cas d'augmentation de capacité avec franchissement des seuils ou critères prévus à l'arrêté ministériel du 15 décembre 2009. Ne concerne que (i) les installations utilisant des composés organiques volatils (Directive COV), (ii) les installations IPPC et (iii) les industries chimiques et pétrolières;  Critères Objectifs.

3. cas général : appréciation au cas par cas dans toutes les hypothèses (y compris si la modification proposée est inférieure aux seuils de déclenchement des cas particuliers 1 et 2) - le Préfet doit examiner si la modification "entraîne des dangers ou des inconvénients nouveaux significatifs ou si les dangers et inconvénients sont significativement accrus" (Circulaire du 14 mai 2012).

C'est sur ce troisième cas que la circulaire du 14 mai 2012 est la plus prolixe. S'agissant d'une appréciation au cas par cas, on est loin de critères objectifs (comme pour les cas 1 et 2) et l'exploitant se réserve ici encore de longues discussions avec la DREAL ...

Conformément à la jurisprudence, les préfets sont appelés à tenir compte non seulement de la dernière modification de l'installation "mais aussi des changements successifs ayant pu affecter l'installation depuis la dernière procédure complète d'autorisation".

Conséquences

- si la modification est 'significative', l'exploitant doit déposer un nouveau dossier de demande d'autorisation pour obtenir un nouvel arrêté d'autorisation. Autrement dit, une procédure de plusieurs mois commence avec mise à jour de l'étude de dangers, enquête publique, consultation CODERST, etc. La modification ne peut pas être mise en oeuvre avant la délivrance de la nouvelle autorisation.

- si la modification n'est pas 'significative', le Préfet peut simplement prendre un arrêté complémentaire afin de tirer les conséquences de la modification sur l'arrêté d'autorisation existant.

Délai d'instruction

On peut saluer la directive du Ministre demandant aux Préfets (DREAL, DRIEE) de répondre à l'exploitant dans un délai maximal de deux mois suite à une demande visant à savoir si la modification est considérée comme substantielle ou non.

On regrettera cependant que ce délai soit mentionné dans une circulaire et non dans le Code de l'environnement. Ce délai n'est en effet qu'indicatif et non contraignant.

Pour aller plus loin

- lire la circulaire du 14 mai 2012
- consulter l'article R.512-33 du Code de l'environnement
- consulter l'arrêté du 15 décembre 2009

ShareThis